Jacques Chêneau, M.D.
39 rue des Chanterelles, 31650 Saint Orens france
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RESUME DE L’ATELIER D’EVPATORIA EN UKRAINE
Evpatoria est une ville côtière de la mer noire qui, du temps des Soviets, avait été vouée au traitement et à la convalescence. On y compte soixante deux établissements de soins. Celui dont j’étais l’hôte s’appelle « Orlionok », construit en 1933 à côté d’une villa qui fut la dernière résidence du Tsar Nicolas 2, accompagné à l’époque par le prince Youssoupof. Pour la quatrième fois en trois ans, j’y animais un atelier de trois semaines où nous avons vu beaucoup de patients, donné des conseils, réglé des corsets, et en avons fabriqué une cinquantaine. Je suis enchanté par la qualité du travail de cette équipe. Bien évidemment, il reste de très petits détails à mettre au point, et que j’évoquerai plus loin dans ces lignes.
Il y a eu très peu de changements, mais des perfectionnements importants concernant la maintenance. Il m’est devenu impossible de rédiger en cinq langues, comme autrefois, car l’âge m’oblige à réduire mes activités et les ralentit beaucoup. Je m’efforcerai de délivrer un texte anglais, allemand et peut-être espagnol et russe, Il y aura des fautes de traduction, mais je sais que ce sera compréhensible, puisque dans un proche passé, j’ai relu une version russe qu’un ami ukrainien, le Docteur Borzunov, avait faite à partir de « mon » Anglais, et elle était compréhensible.
Il y a un fait généralisé et qui me désespère. D’une part, les praticiens traitants (tous ceux de chaque équipe), ont l’obligation absolue de connaître toute la physiopathologie de la scoliose et tous les mécanismes de la correction par action sur les 54 zones que j’ai décrites. Tous ceux qui n’ont pas accepté cette nomenclature, souvent complétée, mais malheureusement indispensable, ont dévié. Le deuxième obstacle au traitement de la scoliose est le temps exigé non seulement pour la fabrication (problème presque résolu à présent par l’informatique), mais surtout pour la maintenance. L’adaptation du corset après un mois, puis tous les trois mois, exige avant tout l’augmentation de volume élective des chambres d’expansion. Un corset non entretenu ne vaut rien après quelques mois. Alors les praticiens ont le choix, ou bien de faire un travail long et ingrat et de ne gagner que parcimonieusement leur vie, ou bien d’obtenir de l’argent sans rendre de grands services au patient qui, s’il a une scoliose évolutive, devra être opéré.
Dans tout ce que nous décrirons, nous supposons avoir à traiter une scoliose dont l’apex thoracique ou thoraco-lombaire est situé à droite. Si nous n’adoptions pas cette convention, les artifices de style alors nécessaires seraient inextricables. Le lecteur, lorsqu’il sera confronté à un patient dont l’apex thoracique ou thoraco-lombaire serait gauche, devra faire l’effort, malheureusement difficile, d’inverser ses réflexes.
Sur les images où deux silhouettes coexistent, celle de gauche est censée être notée A et celle de droite B Les autres suivent de gauche à droite selon l’ordre des lettres.
Au cas où un patient ne pourrait pas marcher, le plus souvent pour cause de lésions fémoro-cotyloïdiennes, on pourra faire un corset destiné à la personne couchée ou au fauteuil. On peut aussi se contenter d’aménager le fauteuil ou le lit, c’est assez facile. Mais il ne faut pas croire ni tenter de faire croire que le corset permettra au patient de marcher.
Voici une vérité mille fois répétée. Si l’on veut corriger vite une courbure, c’est-à-dire redresser tous les tissus correspondants aux tranches de corps concernés, on pourra le faire, par exemple avec des moyens de pression considérables comme ceux du cadre d’Abbott. Mais alors cette correction n’affectera que les tissus en saillie gibbeuse. Que deviennent alors les tissus comme os, muscles, tendons, aponévroses, poumons, plèvres et d’autres qui se trouvent dans une zone concave, déprimée en creux par rapport à une silhouette symétrique de référence ? Il y a une expansion partielle, fortement limitée par les rétractions. Il est possible mais non certain que, pour des déformations modérées, ces tissus s’organisent en situation normale avec le temps, à condition formelle que des chambres d’expansion complètes et suffisantes leurs aient été ménagés. L’unité de ce temps, variable avec certains facteurs comme l’âge, peut raisonnablement être fixée à un mois. Ceci explique qu’une réduction de courbure qui survient immédiatement après la pose d’un corset, plâtré ou plastique, soit inévitablement accompagnée par un affaissement des zones concaves. C’est pourquoi je ne cherche jamais à corriger une scoliose le premier jour. Toute radiographie prématurée est décevante, à peine quelques degrés gagnés. Pour avoir une correction importante, souvent complète, et une bonne remise en forme des parties concaves, il faut au moins un mois, des chambres d’expansion suffisantes et un nouvel ajustage très soigneux du corset. Dans l’esprit de la majorité de ceux qui ne connaissent pas ou mal mon système, c’est l’augmentation de pression des zones gibbeuses que l’on recherchera en premier lieu lorsque l’on procède à l’ajustage. C’est ce que font toutes les autres écoles. Mais mon système est conçu de telle sorte que c’est la croissance qui joue ce rôle d’augmentation de pression des appuis au cours du temps. Si bien que presque toujours, il est inutile d’ajouter une pelote de mousse ou un feutre à l’intérieur d’un appui. On augmentera par contre très généreusement les volumes des chambres d’expansion. C’est à ce moment, le contrôle du mois suivant, que l’on pourra décider d’enlever un maximum de parois de corset en zones concaves, pour ne laisser qu’un squelette constitué par les appuis et les bandelettes de liaison. On décidera alors aussi des découpages de zones à déplacer directement sur le patient pour choisir la meilleure forme, la meilleure correction et le meilleur confort. On dotera hardiment le corset de renforts, soit polyéthylène soit en fibres de carbone, partout où le matériau semblera d’une résistance incertaine. Tout ceci est réversible, rattrapable à tous moments et à tous niveaux, et devrait aboutir à des corsets efficaces, discrets et confortables.
Poznan, Pologne, Novembre 2004. Habituellement, je ne montre pas le visage des patients pour assurer l’anonymat. Mais cette jeune fille a voulu que je montre, non seulement le corset, mais aussi sa joie d’avoir un appareillage aussi confortable et aussi discret. A l’arrière plan, le Docteur Kotwicki. Depuis, il n’y a pas eu de changements importants dans la fabrication du corset. Seule la maintenance a été améliorée.
J’ai eu des nouvelles de la jeune fille de cette image. Il parait qu’elle va bien.
Dès 2006, nous nous étions réunis avec le Docteur Kotwicki,et Monsieur Grabski, pour organiser la maintenance des corsets comme je le faisais au début des années 70. On détache la ou les éventuelles parties non adaptées du corset. On en détermine la position directement sur le patient. Puis on fixe le tout hors patient par rivetages et pontages. Deux ans se sont écoulés depuis, et ce système a fait depuis ses preuves de facilité, de rapidité, de confort et d’efficacité.
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